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Michel BERNARD

Accompagner la transition du littéraire du papier au support numérique

« Accompagner la transition du littéraire du papier au support numérique, telle devrait être une des tâches prioritaires des études littéraires aujourd’hui.
La “grande conversion” concerne en effet les littéraires à deux titres : d’une part, le corpus des œuvres et celui des études critiques sont en train de changer de support, ce qui entraîne d’inévitables mutations dans les lectures, et d’autre part les auteurs contemporains commencent à investir le nouveau support en créant de nouvelles formes artistiques, totalement ou partiellement textuelles. Notre conception même du “littéraire” ne sortira pas indemne de cette numérisation généralisée des supports. Depuis la transcription des traditions orales, il n’y a pas eu de mutation de cette ampleur dans le domaine culturel. Ce bouleversement des usages et des modes de transmission va induire des pratiques nouvelles, des réévaluations patrimoniales, des modifications profondes des circuits de production, de légitimation, de conservation de la littérature.
On peut déjà, aujourd’hui, constater l’impact de l’outillage informatique sur les études littéraires, qui ne peuvent plus ignorer, par exemple, l’existence de grandes bases de données textuelles, de nouveaux dispositifs d’édition savante ou les apports de la statistique textuelle. La fouille de données a déjà produit des résultats tangibles et devrait encore progresser dans les années à venir. La construction de grandes bases de données par les chercheurs en Lettres commence aussi à devenir une pratique courante et de nombreuses thèses récentes donnent naissance à de tels outils, ce qui permet de développer des habitudes de travail collaboratif et de partage de l’information, courantes dans d’autres disciplines scientifiques.
L’édition des textes littéraires sous forme numérique, qui ne donne lieu à l’heure actuelle qu’à une reproduction assez mimétique, fournira bientôt aux auteurs de nouvelles potentialités expressives. Certaines expériences actuelles illustrent les possibilités de ce support : poésie cinétique, hypertextes narratifs, récits interactifs, générateurs de textes, etc. Des entreprises comme celle de Publie.net commencent dès aujourd’hui à reconfigurer le champ de l’édition littéraire.
Le lecteur, l’usager, s’y retrouvera-t-il ? Comment va-t-il réinvestir sur un nouveau support les habitudes et les compétences acquises avec le papier ? Le point de vue de l’”esthétique de la réception” sera précieux pour envisager le phénomène littéraire du point de vue de la lecture. Les conséquences sur l’enseignement seront cruciales pour l’avenir de notre patrimoine littéraire. »

Biographie/Bibliographie

Michel Bernard est professeur de littérature française à l’Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3, et membre de l’UMR THALIM. Le centre de recherche qu’il dirige porte le nom d’Hubert de Phalèse et s’est donné comme objectif de diffuser les méthodes de recherche informatisées au sein des études littéraires. Ses travaux portent ainsi sur les études textométriques de corpus littéraires, ou sur l’utilisation de bases de données, sur l’édition numérique ou sur les nouvelles formes de création littéraire permises par le support numérique. Son dernier livre (L’Histoire littéraire au risque de l’informatique. La question du canon littéraire, Presses de la Sorbonne Nouvelle, 2011, 149 p.) montre qu’une approche statistique de l’histoire littéraire permet de mieux comprendre les phénomènes de représentation du phénomène littéraire.

Contact

/ Site internet : http://michel.bernard.online.fr/CV
/ Mél. : Michel Bernard - michel.bernard(a)univ-paris3.fr